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DEMOCRITE, atomiste dérouté
5 décembre 2008

Tout passe

Démocrite le rieur à David l'exalté

Je te rejoins grandement, cher ami, quant à l'usage que tu fais de la métaphore. Si la philosophie se destine à  la vérité c'est en ce qu'elle accepte sa propre faille à savoir le dévoilement d'un réel qui ne peut être nommé. Le Réel  est l'innommable, l'indicible, l'insaisissable, le tourbillon de Démocrite l'ancien, le hasard d'Epicure, la vacuité des Bouddhistes, le silence aphasique de Pyrrhon (le sceptique), la faille qu'aucune représentation ne peut combler adéquatement ; bref, la raison se tait devant l'éternelle mobilité du Réel, ce "il y a" qu'aucune équation ne peut formuler, qu'aucun discours rationnel ne peut contenir. Il ne reste plus que le silence et la poésie, ce recours ultime à la déroute d'un langage qui renonce à la prétention de "dire" et qui se contente de parler de manière tourbillonnaire, tel un jeu de forces antagonistes. La métaphore est une de ces mises en déroute et c'est pourquoi je te rejoins. Nietzsche l'avait bien vu : les hommes sont prisonniers de la grammaire (Crépuscule des Idoles) et de leur besoin de substances et de sens ; ils veulent, à tout prix faire exister de l'Etre quelque part, du Réel comme s'il suffisait de penser pour fonder quelque chose. Tout cela n'est que vanité, tout cela n'est qu'illusion. Alors, place à la poésie, à la contre-parole, à la métaphore sans langage et sans verbe, au refus de la syntaxe pour faire sentir, pour donner envie de goûter l'ivresse de la création et de la déroute dans l'expérience du Clinamen. Oui, mon ami, faisons vivre la métaphore !
- Si tu saisis l'impossible quête de la philosophie, ce qui revient à te dessaisir de toute prétention, c'est que tu découvres en toi l'impermanence, c'est-à-dire le  régime tragique de la nature. "/Tout passe/", selon le mot d'Héraclite le sage. Tout passe, même l'amitié, l'amour et ce qu'il y a de plus  important à nos yeux. Nous aussi nous passons comme des feuilles dans le grand vent d'ouest et pourtant, nous nous sentons importants, vivants et comme présents à l'éternité de la nature.  /Tout passe/ sauf le tout de la nature, ce /il y a/ que j'évoquais auparavant. Le tragique est la découverte de cette impermanence universelle, du régime passager de toute chose, sentiment de la mort au milieu de la vie ou plutôt le contraire, la vie, cas particulier de la mort. Cette ultime vérité défait toutes les autres puisque tout passe. La philosophie tragique procède d'un dévoilement du hasard pour seule réalité ; un impensable comme centre, un quelque chose qui défait toutes les certitudes jusqu'à son propre fondement : telle est  la philosophie tragique, une philosophie de la joie,  de la destruction et de la création, ce qui est une seule et même chose.
Concernant le mouvement, je crois que la réponse se trouve déjà dans ce développement. Ce n'est pas le mouvement qui fait problème car la flèche atteint la cible (Zénon), c'est la raison qui prive les choses de leur mouvement. (Revoir sur ce point les excellentes analyses de Bergson); Le mathématiques détruisent le mouvement car elle le nient en le spatialisant, en le reconstruisant. Il faut se défaire là encore de la rationalité délirante qui nous prive de ce contact avec la durée ou la mélodie secrète et pourtant immédiate du monde.

Porte-toi bien

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