Le Jaüt et le vautour
Du Soum de Granquet, 1880 m
Je reviens des cimes pyrénéennes et du grand frais. J'ai contemplé cet après-midi, le vol imperturbable des vautours, j'ai marché sur des pentes raides, j'ai senti la mollesse de la neige d'automne, son tempérament précaire et audacieux ; je me suis hissé au faîte d'une montagne, seul. J'ai fraternisé avec les pics, les cimes et autres divinités calcaires qui déchiraient un ciel déjà crépusculaire. Il faisait froid mais c'était grand et beau ! La marche dans cette nature abrupte et sauvage me rend à la puissance de la vie, décuple l'énergie du corps, excite la sensibilité, stimule l'attention, invite au silence d'une aphasie réconciliatrice. La pensée se tait et la peau refait surface, réapparaît à la conscience comme surface inépuisable d'impressions que l'air et les éléments stimulent. En ces lieux de haute densité, je sais la vérité et cela fait ma joie.