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DEMOCRITE, atomiste dérouté
22 février 2011

Le concerto en sol de Ravel, variation sur Daphnis et Chloé

 

        J'aime la musique de Ravel. Pour mon dix-septième anniversaire, mes parents m’avaient offert une cassette du compositeur contenant le célèbre Boléro sur la face A. La face B avec Daphnis et Chloé fut un choc majeur. Je succombai au ballet en ayant le sentiment de participer à une épopée chevaleresque et romantique qui me plongea irrésistiblement dans un état second. Je m’enfermais alors dans ma chambre, retiré du monde. Il n’y avait plus que moi, la musique et mes rêves animés d’une sauvagerie que la seconde partie de l'oeuvre déployait en fantasmagories ondulatoires.

       Je me souviens avoir invité dans ma chambre une jeune femme magnifique, aux yeux profonds dont j’étais gravement et secrètement amoureux, officiellement pour partager une expérience esthétique. Terrible expérience en effet car la musique suspendit entièrement ma volonté dans une sublimation indéfinissable. Nous restâmes d’une étonnante « sagesse », nous laissant seulement portés par les vagues symphoniques successives tandis que, haut perchée, la flute erratique et solitaire incarnait le désir transfiguré que j’éprouvais pour la Belle sise à mes côtés. D. et Clo…..furent condamnés à se manquer.

      Plus tard, je découvris les deux concertos pour piano. Je les gardai pour moi seul, ayant décidé de ne plus mélanger les genres. Mais il est un secret immiscé dans le deuxième mouvement du concerto en sol, c’est la rencontre inachevée de Daphnis et Chloé, la danse finale du piano et du hautbois : effleurement, joute érotique, intensité solaire face au crépuscule ; ce moment me bouleverse toujours, me chahute et m’émeut profondément. Les deux instruments s’enlacent et se manquent, se croisent et se perdent, sublime oscillation, séparation inéluctable. L’ascension mélodique de l’un fait chuter l’autre dans une gravité sans retour. Les cordes ne sont pas faites pour le vent. Le piano emporte, éperdu, la mélancolie de son destin, la solitude de son pas. Le hautbois se tait et le silence tombe avec la nuit.

 

Pour écouter le deuxième mouvement du Concerto en sol  de Ravel cliquez ici  (durée 9 min 37)

 

 

 

 

 

 

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Commentaires
D
Etrange et sympathique découverte que ce boléro qui emporte dans sa rengaine légèrement électrique la résistance qu'on pourrait spontanément lui opposer. C'est la force d'une oeuvre que d'autoriser d'infinies variantes et de poursuivre cependant son existence sans subir la moindre altération. Comme l'écrivait Blanchot, "l'oeuvre d'art est infinie, non finie..." ; le boléro ne s'achève pas.<br /> Merci pour ce partage surprenant.
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D
Je suis heureux de savoir que ces oeuvres rencontrent la sensibilité d'autrui. La version mise ici en ligne du concerto en sol est jouée un peu lentement mais finalement, je la trouve fort réussie.<br /> Pour ce qui est de la version du boléro, je m'y précipite et comme on dit au pays des ch'tis, "et je vous dis quoi"...
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V
J'ai eu un peu de mal à le trouver, mais je viens d'offrir à mon amie ledit concerto, mais joué par Michelangeli. <br /> En outre le Daphnis et Chloé est dans mes favoris et je l'écoute régulièrement. <br /> Tout arrive je vous dis, tout ! :-)<br /> <br /> Pour le boléro, connaissez-vous cette version génétiquement modifiée ? :<br /> http://www.youtube.com/watch?v=gY3csjT6BQ0
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