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DEMOCRITE, atomiste dérouté
28 juillet 2023

Vitalité

Pano Cabaliros bis 27 07 23

 Cabaliros - Vue sur Cauterets - Photos de Démokrite, non libres de droit.

Cela fait longtemps que j'avais le désir de remonter sur ce pic du Cabaliros en Bigorre qui offre un formidable panorama sur les Hautes-Pyrénées, le Béarn et la plaine. L'acquisition d'un nouveau véhicule suspendu me permet d'emprunter des pistes défoncées, ce qui accroît considérablement mes possibilités. De là-haut, je médite mais je suis aussi gagné par des pensées obscures. Je dois les accueillir. Peut-être partiront-elles d'elles-mêmes ?

Je reçois beaucoup de marques de sympathie, d'amitié, de compréhension de lecteurs, de vieux Camarades, d'Amis proches, de la famille concernant la situation qui est la mienne et dont je n'aurais jamais envisagé l'ampleur il y a peu. Cela me fait, je dois le dire beaucoup de bien. C'est lorsque ça ne va pas qu'on sait sur qui on peut véritablement compter et avec qui on peut authentiquement parler. Le bavardage est le lot commun. Mais entendre une parole, la décrypter, suivre son cheminement, sa généalogie n'est pas donné à tout le monde. En général, ceux qui peuvent et savent parler sont ceux qui ont fait pour eux-mêmes un travail personnel psychique sérieux et pour qui existent une exigence de vérité et un sens profond de la relation. Ces personnes sont rares et précieuses car elles savent la grande souffrance que peut infliger le vivre. Les autres sont communes et ne présentent guère d'intérêt.

Cabaliros retour_modifié-1

Leur bavardage résiste au caractère négatif que le Réel inflige à chacun sous des modalités souvent imprévisibles. Il évite toute remise en question et maintient le régime de la surface sur lequel le moi peut déployer son imaginaire, sa représentation, la doublure dont il a besoin pour tenir. Ne les blâmons pas. Chacun bricole et fait comme il peut. Mais il est difficile de se rendre compte que ceux qu'on croyait capables d'entendre une crise qui, comme le note Hannah Arendt avec tant de justesse, est toujours un moment de vérité, prennent véritablement la poudre d'escampette et disparaissent de votre champ de vision comme si vous étiez devenus un pestiféré. 

Sans doute y a-t-il là une affaire de contagion comme la "bactérie", ce bâton dont se sert le névrosé pour se soutenir dans l'existence.  Comment faire pour inscrire dans le symbolique le régime des affects qui s'est lui-même perdu dans l'imaginaire d'une relation ? Il faut dire que des vérités font peur. J'ai beaucoup parlé de la structure perverse. Personne n'est vraiment préparé à affronter ce type car il ne repose que sur le masque, que sur le désir de paraître et de paraître bien, ce qui le rend irrepérable, insaisissable, adapté. Seuls les vrais intimes peuvent découvrir des failles dans cet édifice de carton pour peu qu'ils observent et reniflent, mais de là à nommer pareils traits, il y a un monde, d'autant qu'en règle générale, on ne veut ni voir ni savoir (ça-voir).

Cabaliros - vers l'est

 

Il m'aura fallu me rendre au cinéma pour assister à la projection du fillm L'Amour et les forêts avec Virginie Efira et Melville Poupeau pour que se passe quelque chose d'imprévu. Voilà qu'à la fin du film, je ne me sens pas très bien et qu'opère en moi un processus d'identification à la victime jouée ici par le personnage féminin, victime d'emprise sévère. Je ne vis fort heureusement pas la même chose, mais je partage quelque chose avec elle que je ne peux décrire ici. Je me sens comme "possédé", infiltré, infecté, me rendant compte que j'ai accepté des situations simplement inacceptables, ce qui arrive précisément à l'héroïne du film. Je prends peur et m'inquiète pour moi-même. C'est à peu près à ce moment que débute une sorte de lent réveil, d'émergence, de besoin de nommer ce qui se passe pour moi. C'est là que le travail thérapeutique fait entrer dans le symbolique ce que je suis en train de vivre. 

P1850454 bis

 

Vignemale et Viscos au premier plan

Pour finir sur ce point car ces hauteurs méridionales ne méritent vraiment pas tant de gravité, je comprends combien la structure dont j'ai parlé et qui est dramatiquement assez commune (plus de 3% de la poulation sont concernés par la structure perverse, sans doute 10 fois ou 20 fois plus pour des traits) est un lent processus de vampirisation qui contraint le sujet à la régression vers un stade appelé "figement", hors-langage. C'est la raison pour laquelle il est impossible de dialoguer avec une personne atteinte de ce trouble si on entend par dialogue non pas une réflexion intellectuelle abstraite mais un questionnement relatif à des failles ou à des comportements totalement inadmissibles dont vous avez été la victime et qu'il est impossible de passer sous silence. Elle le refuse systématiquement et use de toutes les stratégies possibles pour esquisser tout ce qui vient mettre en défaut la surface qu'il faut maintenir narcissiquement rentable. Le hors-langage imposé alors, c'est-à-dire le silence ou le détournement ou le mise en accusation à travers des processus de retournement fait basculer dans l'inhumanité et la désubjectivation, ce qui est une expérience insupportable pour tout être normalement cérébré. C'est pourtant là que vous emporte la personnalité perverse, dans l'impossible à dire, dans le trou de sa propre faille dès lors que vous cherchez à comprendre ce qui est en train de se passer et qu'elle veut vous imposer coûte que coûte.

Cabaliros - Vue Gabizos bis

      Pour l'heure, je profite comme je peux de l'extraordinaire paysage qui s'offre à moi comme cette vue sur les Gabizos. C'est drôle ! Partout ou presque, où je suis allé, j'y étais souvent accompagné d'une danseuse légère. C'est désormais ma propre légèreté que je redécouvre, mon psychisme ascensionnel comme dirait Bachelard. Je suis monté sans me forcer, sans être écrasé par la gravité, le pas délesté, tranquillement, en à peine une heure trente sans m'imposer le moindre rythme. Le corps et son énergie ont exprimé une vitalité retrouvée. Il était temps.

 

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