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DEMOCRITE, atomiste dérouté
18 novembre 2003

Kairos ou l'occasion manquée

Lettre à Hérodote

Démocrite le rieur à Hérodote le voyageur, Salut

    Quelle joie et quelles ouvertures de pensée à l'occasion des rencontres cité-philo. Le conférence de samedi dernier fut des meilleures, celle centrée sur le fameux Kairos. Du Kairos en Chine et en occident (Grèce antique) ? Comment peut-on confronter ces deux approches de l'existence dans cette nécessaire rencontre à la nature ou à l'événement ? Autant dire que tu aurais été sensible à ces développements ; j'ai heureusement pris beaucoup de notes et nous pourrons éventuellement en discuter plus loin. Comment te résumer tout cela ?

C'est tout l'art de la stratégie qui s'y (dans le Kairos) déploie, c'est-à-dire l'art de la guerre ou la vertu du politique d'un côté, mais aussi l'art de penser une attitude philosophique dans le langage et notamment telle qu'il peut s'exprimer dans la pratique des sophistes, passés maîtres d'une rhétorique jouissive et anti aristotélicienne (parler pour le plaisir de parler).

    Sans t'en dire plus pour le moment, sache que j'ai l'intention de reprendre cette question du Kairos qui me renvoie de façon décisive à la fameuse métaphysique des chocs ou de la rencontre que j'ai développée dans l'intuition du hasard absolu que tu connais. Il y a là de quoi chercher car si les sophistes font du Kairos cette opportunité inscrite dans le logos, ils ne le situent pas dans les choses mêmes mais au coeur du discours.

Inutile de te dire que je suis évidemment intervenu pour rappeler que notre ami commun, Anaxarque, qui fut mon disciple et le "maître" de notre sage Pyrrhon écrivit un "Traité du Kairos". Aussi ai-je posé la question du caractère "impensable" et non conceptualisable de cette émergence paradoxale que constitue le Kairos. Autrement dit, j'ai souligné la dimension potentiellement insignifiante du Kairos telle qu'elle peut être attribuée à mon intuition initiale (et géniale, mais je ne l'ai pas dit comme ça). L'oratrice fut fort désarçonnée par mon développement et me taxa d'aristotélicien. C'est que la "pauvre" femme ne comprenait rien à cette intuition de l'insignifiance...mais je ne lui en veux pas, car j'ai pu mieux me rendre compte de la puissance résolument "terroriste" ( au sens de C. Rosset) de l'approche tragique, capable de débusquer toutes traces de "morale du sens et de la maîtrise" à laquelle notre conférencière restait malgré tout attachée.

    J'ai bien l'intention de creuser cette question et notamment les passerelles évoquées par l'autre intervenant (François Jullien) entre Orient et Occident. J'ai reçu comme la confirmation que la pensée atomiste originelle demeure cette voie médiane, emprunte de lâcher-prise et d'une sagesse de l'insignifiance, telle que Lao Tseu a pu, non pas la concevoir, mais l'initier. La sophistique serait-elle une issue possible d'un point de vue pratique à l'expression du Kairos ? Je ne sais pas encore. Je n'ai pas été convaincu mais une nouvelle voie émerge, et je compte bien m'y engouffrer. Peut-être un deuxième ouvrage en perspective, "Kairos ou l'occasion manquée ?"

    Donne moi de tes nouvelles, j'attends la confirmation de notre prochaine rencontre et je m'en réjouis. Faisons en sorte que ce Kairos soit une opportunité insignifiante, mais une opportunité quand même...

   

Porte-toi bien

   

Ton ami Démocrite le rieur,

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